
Le 14 mars 2025, la mission franco-chinoise SVOM a détecté un sursaut gamma à z ≈ 7,3, le 3ᵉ sursaut gamma le plus distant jamais observé, émis lorsque l’Univers n’avait que 5 % de son âge actuel. Le JWST a ensuite révélé la supernova associée, la plus ancienne jamais vue: une performance exceptionnelle. Le Laboratoire d’Astrophysique de Marseille (LAM – OSU Pythéas, CNRS, AMU, CNES) a joué un rôle clé dans cette découverte et l’analyse des données.
« C’est remarquable de pouvoir observer la lumière de la fin de vie d’une étoile aussi tôt dans l’Univers. Nous savions que le Webb en était capable, mais il vient de le démontrer de manière spectaculaire », explique Benjamin Schneider, post-doctorant au LAM. Les supernovae jouent un rôle essentiel dans l’enrichissement de la matière et dans l’évolution des galaxies. Or, à cette époque de l’Univers, de nombreuses questions restent ouvertes. Ces nouvelles observations sont particulièrement prometteuses pour mieux comprendre ces premières phases de l’histoire cosmique.
Les sursauts gamma (GRBs) sont parmi les phénomènes les plus violents et spectaculaires de l’Univers. Ils se manifestent sous la forme d’un bref flash de rayonnement gamma qui ne dure que quelques fractions de seconde à quelques minutes, pouvant sonder les confins de l’Univers de manière unique. Ils sont produits par un trou noir nouvellement formé lors de l’effondrement d’étoiles massives, ou la fusion d’objets très compacts comme des étoiles à neutrons.
Le premier sursaut gamma à grand redshift détecté par SVOM
La Chine et la France ont lancé en juin 2024 la mission SVOM (Space-based multi-band astronomical Variable Objects Monitor), dédiée à l’étude de ces phénomènes transitoires à haute énergie. Le 14 mars 2025, SVOM a détecté un sursaut gamma particulièrement intéressant, le GRB 250314A, déclenchant une campagne de suivi au niveau mondiale impliquant plusieurs équipes internationales.
Des chercheurs du Laboratoire d’Astrophysique de Marseille (LAM) incluant Benjamin Schneider, Ny-Avo Rakotondrainibe et Antonio de Ugarte Postigo ont activement participé à ces observations de suivi. Ils ont permis de déterminer la distance de ce phénomène en combinant des observations du Nordic Optical Telescope (NOT), Gran Telescopio Canarias (GTC) et Very Large Telescope (VLT). Ces observations ont révélé que le sursaut gamma présentait un décalage vers le rouge très grand, d’environ z ≈ 7,3, correspondant à une époque située seulement 730 millions d’années après le Big Bang.
Le GRB 250314A est le troisième sursaut gamma le plus éloigné dont la distance ait été confirmée spectroscopiquement. La détection du GRB 250314A par SVOM seulement quelques mois après son lancement révèle tout son potentiel et ouvre des perspectives particulièrement prometteuses pour l’étude des premiers instants de l’Univers dont les premières générations d’étoiles.
Sa supernova associée détectée par le JWST
Le télescope spatial James Webb (JWST) a observé le champ du GRB 250314A le 1er juillet 2025, soit 110 jours après l’explosion. Ces données ont révélé, pour la toute première fois, la présence d’une supernova à une distance aussi vertigineuse. Il s’agit de la supernova la plus ancienne jamais identifiée, observée à une époque où l’Univers n’avait que 5 % de son âge actuel.
Dans cette étude, Benjamin Schneider et Véronique Buat (LAM) ont utilisé un outil d’analyse développé au LAM, CIGALE, qui permet d’estimer les propriétés des galaxies à partir de leur lumière. Grâce à cet outil, ils ont pu montrer que la lumière observée par le JWST ne pouvait pas uniquement provenir d’une galaxie, mais qu’il y avait une contribution supplémentaire : la supernova. De nouvelles observations avec le JWST sont prévues pour l’été 2026 afin d’étudier plus en détail la galaxie hébergeant le sursaut gamma, une fois que l’émission de la supernova associée se sera suffisamment atténuée.
L’identification des sursauts gamma à grand redshift reste difficile
À de telles distances, l’expansion de l’Univers étire la lumière vers l’infrarouge, rendant ces phénomènes invisibles aux télescopes dans le domaine du visible. La France (AMU, CNES et CNRS), en collaboration avec le Mexique (UNAM et SECIHTI), a développé le télescope robotique COLIBRÍ, un élément clé du réseau de suivi de la mission SVOM. COLIBRÍ sera prochainement équipé d’une caméra infrarouge, qui permettra d’identifier plus rapidement les sursauts gamma à très grand redshift et d’améliorer notre capacité à étudier leur nature et à déclencher des observations de suivi depuis les plus grands observatoires au sol et dans l’espace.
Pour en savoir plus :
https://doi.org/10.1051/0004-6361/202556580
https://doi.org/10.1051/0004-6361/202556581
https://science.nasa.gov/missions/webb/nasas-webb-identifies-earliest-supernova-to-date-shows-host-galaxy/
Contact : Benjamin Schneider (benjamin.schneider@lam.fr)
Credit illustration: NASA, ESA, CSA, STScI; Science: Andrew Levan (Radboud University); Image Processing: Alyssa Pagan (STScI)



